Raoul Philippe
TITRE : les chiffres publiés (ailleurs) par l'exploitant attestent que la Centrale de Provence émet 4 fois plus de CO2 que ce qui est dit dans le dossier
L'exploitation de la centrale de Provence est autorisée au motif qu'en brûlant du bois au lieu du charbon, elle permet de diminuer les émissions de gaz à effet de serre pour une même production d'énergie.
L'étude d'impact complémentaire énonce qu'une centrale au charbon émet 1058 kgCO2e/MWh alors que la centrale au bois de Gardanne en émet 256 (pages 97 à 99).
Ce bilan assez positif est faussé par la décision opportuniste de ne pas compter le CO2 émis lors du brûlage du bois dans le décompte des émissions de la Centrale de Provence, laquelle a comme principale activité justement le brûlage du bois.
C'est dit discrètement page 96 : " Il est donc considéré dans le cadre de cette étude que l'approvisionnement en biomasse de la centrale de Provence est neutre en carbone (...)".
Les émissions de CO2 ont lieu, mais ne comptent pas car "considérées comme neutres"
I la neutralité n'est qu'une fiction, l'exploitant le sait.
"La classification de la biomasse comme énergie renouvelable ne peut pas pour ce seul motif permettre de considérer que ses effets environnementaux directs ou indirects seraient nuls ou négligeables.
(...)
Mais cette neutralité carbone est sur ce point une pure convention comptable."
Qui dit cela ? un magistrat du Conseil d'Etat.
A quelle occasion ? à l'occasion d'une décision en cassation relative à ….. la Centrale de Provence : ↓
https://www.conseil-etat.fr/arianeweb/#/view-document/?storage=true
↑ c'est en libre accès ==) si le citoyen lambda en prend connaissance, difficile d'imaginer que le principal intéressé, l'exploitant de la centrale, ne connaît pas l'avis "réservé" qui a cours au Conseil d'Etat.
De même :
"Bilan carbone de la biomasse énergie
Neutre = renouvelable ? Non. Neutre n'est pas équivalent à renouvelable.
Le bois est une énergie renouvelable. Après exploitation sur un territoire, cette énergie peut se reconstituer dans un temps raisonnable. Comme l'éolien, le solaire, et l'hydraulique, la biomasse restitue l'énergie solaire. Néanmoins, la biomasse n'est pas forcément renouvelée dans tous les cas. Et cela ne signifie pas que son utilisation énergétique est neutre vis-à-vis de l'atmosphère. Il ne faut pas oublier qu'il n'y pas de différence entre une molécule de CO2 issue de la biomasse et une molécule de CO2 issue de combustibles fossiles. Les deux participent également à l'effet de serre. L'utilisation de bois énergie ne garantit nullement le captage simultané d'une quantité équivalente de CO2 par ailleurs. Or c'est la condition sine qua non pour parler de neutralité."
Qui dit cela ? le CITEPA, l'organisme para public qui étudie toutes les questions relatives aux émissions de gaz à effet de serre.
https://www.citepa.org/wp-content/uploads/3.2-Biomasse-%C3%A9nergie-et-neutralit%C3%A9-carbone.pdf
II le bilan carbone réel de la Centrale de Provence.
En réalité, comme l'a indiqué une association des Hautes-Alpes (CLIMAT05) l'exploitant déclare au registre des émissions polluantes le vrai chiffre des émissions de CO2 de la centrale.
Un site officiel publie les déclarations des entreprises concernées : georisques.gouv.fr
En 2022,
L'exploitant déclare que la centrale a émis 406 kt de CO2 en 2022.
La centrale n'ayant produit que 373,5 GWh cette même année 2022, elle émet a minima* 1087 kg de CO2 par MWh produit et non 257 comme dans dans l'étude d'impact complémentaire.
(* "a minima" puisque les émissions indirectes telles que l'acheminement des combustibles n'est pas comptée)
La justification invoquée par la Centrale de Provence, à savoir la diminution des émissions de gaz à effet de serre pour une même quantité d'énergie produite, est contredite par les faits : 1087 kg par MWh produit, ce n'est pas 6 fois moins que 1058, ce n'est même "pas moins du tout" puisque c'est même plus.
III l'incompatibilité du projet avec toutes les orientations des pouvoirs publics.
L'objectif de décarbonation de la production d'énergie se traduit dans de multiples mesures dont la toute dernière est une loi du 14 avril 2025 :
" LOI n° 2025-336 du 14 avril 2025 visant à convertir des centrales à charbon vers des combustibles moins émetteurs en dioxyde de carbone pour permettre une transition écologique plus juste socialement"
Pour que la nouvelle installation soit vertueuse, le seuil sans cesse répété est de 550 grammes de dioxyde de carbone par kilowattheure.
La Centrale de Provence est elle a 1087 grammes de dioxyde de carbone par kilowattheure.
DEUX FOIS TROP (à 13 grammes près)
*-*
De tout ce qui précède résulte que l'avis que doit rendre la commission d'enquête doit être défavorable à l'exploitation de cette centrale ultra polluante (les émissions de gaz à effet de serre étant une pollution en application de l'article L. 220-2 du code de l'environnement)